C’est toujours un plaisir de voir la presse locale faire l’éloge des globe-trotters qui nous prouvent que le vélo est bien un moyen de transport à part entière. Nous en comptons au moins 4 parmi les fidèles de lamassecritique, ils nous apportent toujours du grain à moudre par leurs récits.
Bravo Adrian, merci Var Matin.
90 jours, 6.400km, 44 crevaisons… Ce Toulonnais raconte sa traversée des États-Unis à vélo en solo
- PAR Miguel Charlotiaux
A 30 ans, Adrian Ducros vient de traverser le continent américain de Montréal à Los Angeles, à la seule force de ses jambes. Récit de trois mois d’aventures et de galères.
Il a parcouru près de 6.400 km en trois mois. Adrian Ducros a atterri à Montréal, au Canada, le 22 août. En sortant de l’avion, il récupère son vélo, préalablement démonté. Dans le hall, il dégaine sa clef à molette et s’attèle au remontage. Il se met en selle et rejoint un couple d’amis à 40 km. C’est le début du voyage.
Adrian Ducros est né à Toulon. Son père et sa mère sont, selon ses termes, « à fond vélo ». Il a hérité de la fibre du deux-roues. Adrian arpente toutes les rampes du Mourillon en BMX. « J’avais un bon niveau, j’ai fait de la compétition, j’ai roulé avec des sponsors ». Mais le Toulonnais se blesse et doit abandonner ses ambitions de sportif professionnel. « J’ai varié avec le VTT, j’ai commencé à pédaler sur route pour m’entraîner. J’ai commencé à prendre goût aux longues distances. » En 2016, il rejoint la Vélopostale à Genève, une entreprise de livraison à vélo. Il découvre le deux-roues qui lui servira de destrier pour traverser les États-Unis : le vélo cargo en carbone.
« Les livreurs s’en servent pour transporter des cartons de 70 kg. J’ai acheté le mien, un Omnium en titane. »
Qu’est-ce qui vous a motivé à entreprendre ce périple ?
J’ai des potes à Montréal, Vancouver et New York. Mon plan de base consistait à les rejoindre et je me suis dit… Pourquoi pas à vélo ?
Combien de kilomètres par jour avez-vous parcouru ?
Par exemple, j’ai fait les 633km entre Montréal et Yonkers en cinq jours. En général je fais à peu près 400km en trois ou quatre jours, puis je me prends une nuit dans un motel, histoire de me reposer un peu. Ma plus grosse journée, j’ai parcouru 230km.
Vous avez croisé d’autres cyclistes ?
En ville oui, beaucoup. Le reste du temps, sur les grands axes, j’étais seul.
Quelle était la réaction des gens quand ils vous voyaient ?
Ils me prenaient pour un malade ! (rires). À de nombreuses reprises on m’a klaxonné, on m’a demandé ce que je faisais là.
Les routes étaient bien aménagées ?
En ville, oui. Hors agglomération, c’est compliqué. Par exemple, la célèbre route 66 se transforme en autoroute. Là, c’est chaud, ce n’est pas sécurisé du tout. J’ai essayé d’éviter les voies rapides mais souvent je n’avais pas le choix. Quand tu roules sur les roadsides, les bandes d’arrêt d’urgence, il faut vraiment faire attention. Il y a plein de morceaux de verre, des vieux pneus. En trois mois, j’ai crevé 44 fois…
Le climat vous a été favorable ?
Dans un sens, oui. Je n’ai eu que deux jours de fortes pluies. D’un autre côté, j’ai vécu des journées difficiles. En Oklahoma, il y a un courant froid qui descend de l’Alaska. Le matin, il faisait 30°C. En fin d’après-midi, on tombait à zéro… Mais le plus compliqué, c’était le vent. Passé la ville d’Amarillo au Texas, j’ai pédalé face à des bourrasques de 70km/h. J’ai dû m’arrêter. Au cours du voyage, je me suis fait dépanner trois fois, j’ai pu demander de l’aide et charger mon vélo dans un pick-up. L’autre problème lié au vent, c’est que la nuit, dans la tente, ça m’empêchait de dormir. Du coup, je ne récupérais pas.
Quel a été votre meilleur souvenir ?
Je dirais le Grand canyon. Je suis arrivé de nuit, le lendemain je me suis rendu compte des paysages incroyables qui m’entouraient. Ça m’a marqué.
Votre pire expérience ?
Le premier jour au Texas, sans hésiter. Il faisait très chaud et le vent soufflait fort. J’avais déjà roulé trois jours. J’ai tiré jusqu’à Amarillo, 90km sous 36° au milieu des parcs éoliens avec un vent de face… C’était dur.
Vous avez plannifié le prochain périple ?
Je ne compte pas repartir dans l’immédiat, je dois encore récupérer de ce voyage. Et puis, il est important d’être soutenu. Un trip comme ça nécessite un budget pour l’équipement, le matériel, les billets d’avion. Ça coûte au moins 5.000 ou 6.0000 euros, ça fait un ticket quand même !
Qu’est-ce que ce voyage vous a apporté ?
C’était un défi personnel. Avec du recul, je me rends compte que même si j’étais seul sur mon vélo, j’ai été vraiment soutenu par mes amis et ma famille. J’ai ressenti que j’étais bien entouré, c’est important.